À la source de la rivière de diamants
— Kimberley, Northern Cape
L’orage gronde sur les vastes plaines du Northern Cape, et le ciel est zébré de terrifiants éclairs ("zébré” est le mot exact au pays des Equus bruchelli). Peut-être qu’à l’endroit où elle frappe, la foudre laisse sur le sol un petit diamant ? Nous avons juste eu le temps de planter la tente avant que la pluie, menaçante toute l’après-midi, ne se décide à tomber. Et cette tente se trouve à deux cents mètres du Big Hole, le plus grand trou sur terre jamais creusé par la main de l’homme. C’est là qu’ont été extraits, de 1871 à 1914, 2.722 kg de diamants, ce qui représente un bon nombre de rivières de diamants, avouons-le. Le “grand trou” s’est creusé sur le toit d’une cheminée de kimberlite, un magma jailli des profondeurs de la Terre, charriant avec lui des morceaux du manteau, et parmi eux les précieuses pierres. Car ce pur cristal de carbone ne se forme qu’au-delà de 200 km de profondeur : avant il ne s’agira que de vulgaire charbon, quel paradoxe de l’alchimie !
La ville s’est rapidement construite à côté du trou, peuplée de femmes et d’hommes venus de tous les horizons, attirés par les adamantins reflets de la richesse - et parmi eux d’ailleurs, beaucoup de Noirs, traités comme des voleurs et des moins-que-rien. La plupart auront creusé ici leur tombe, quelques uns auront creusé leur fortune, comme les frères Diederick et Nicolaas Johannes de Beer, les fermiers propriétaires d’un terrain auparavant jugé ingrat, et surtout Cecil John Rhodes, magnat du diamant, fondateur de l’incontournable De Beers Consolidated Mines Ltd. Rhodes a bâti sur ces cailloux une fortune qui lui permit de devenir le Premier Ministre de la colonie du Cap, fer de lance de l’Empire Britannique, et même d’avoir un pays à son nom, la Rhodésie (maintenant Zimbabwe) !
Pénétrant dans le village de pionniers soigneusement reconstitué, nous sommes allés jeter un œil au-dessus du cratère désormais noyé d’eau, avant de passer dans une fausse galerie (un vrai parc d’attractions, avec bruit assourdissant et simulations d’explosions) puis d’arriver dans une exposition très complète. Le clou est sans doute l’immense coffre-fort qui trône au milieu du hall, renfermant plus de 300 diamants de la collection De Beers, dont Eurêka, la première pierre découverte en 1867 par deux gosses, source de la ruée vers le cristal. Le commentaire d’Eugene, notre guide, eut une touche surprenante, critiquant à mi-mots la De Beers d’avoir pillé le sous-sol et d’être partie en enrichissant Londres, mais pas Kimberley. Un ton politiquement incorrect, mais réaliste : maintenant la De Beers a quitté l’Afrique du Sud et opère au Botswana, reproduisant le même schéma qu’il y a un siècle. Ce n’est pas la faute des géologues, mais pourquoi, quand on trouve des diamants, de l’or, de l’argent ou du pétrole, ce n’est jamais la population locale qui en profite le plus ?
Il est 22h passées et nous revenons de dîner. Mais avant d’aller manger une pizza dans le plus fameux restaurant italien de la ville, nous sommes allés nous désaltérer juste à côté, au Halfway House Inn, le pub historique où Cecil John Rhodes venait boire sans quitter la selle de son cheval… et en effet, porte & plafonds sont assez hauts pour le permettre !
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Chapie — Mardi 17 août 2010 @ 8:43
Voila une photo d’une rivière plus calme :